Aujourd’hui, des millions de personnes en France, en Belgique et ailleurs vivent avec un diabète de type 2. Cette maladie chronique, liée à une résistance à l’insuline et à des troubles métaboliques, progresse souvent sans bruit. Il n’est pas rare que les symptômes du diabète de type 2 – fatigue inexpliquée, soif excessive, troubles de la vision ou infections fréquentes – passent inaperçus pendant des mois, voire des années.
Évolution des objectifs thérapeutiques
Pendant longtemps, le traitement du diabète de type 2 reposait sur un seul médicament oral : la metformine. Efficace et peu coûteuse, elle reste encore aujourd’hui la base de nombreuses prescriptions. Mais les attentes ont changé. Il ne suffit plus simplement de réduire le taux de sucre dans le sang ; les objectifs modernes incluent également :
- la protection du cœur et des reins,
- la gestion du poids,
- une meilleure qualité de vie,
- et une prise facile, compatible avec le quotidien des patients.
Pour répondre à ces nouveaux besoins, une nouvelle génération de traitements oraux a vu le jour. Certains médicaments favorisent l’élimination du glucose par les urines, d’autres régulent les hormones de l’appétit, et plusieurs aident aussi à prévenir les complications graves du diabète.
Vous souhaitez mieux comprendre cette maladie, ses origines et ses solutions ? Consultez notre article détaillé :
Traitement et prévention du diabète : un guide clair pour tous ceux qui veulent agir à temps
Metformine : le point de départ du traitement
Lorsque le diabète est diagnostiqué, la metformine est souvent le premier médicament proposé. C’est un choix logique : ce comprimé est utilisé depuis des dizaines d’années, il est bien étudié, peu coûteux et généralement bien toléré.
Dans la plupart des pharmacies, elle est commercialisée sous le nom de
Glucophage(Metformine), un médicament que de nombreux patients connaissent ou utilisent déjà. On le prescrit en général une ou deux fois par jour, souvent au moment des repas pour limiter les effets secondaires digestifs.
Sans entrer dans les détails techniques, la metformine agit principalement en réduisant la quantité de sucre produite par le foie, et en rendant les cellules du corps un peu plus sensibles à l’insuline. Cela aide à maintenir la glycémie dans une zone raisonnable, surtout dans les premiers stades du diabète.
Mais même si la Metformine (Glucophage) a longtemps été considérée comme le « traitement de base », elle ne suffit pas toujours à elle seule. Avec le temps, certains patients ont besoin d’un second médicament pour renforcer son effet. Et chez d’autres, elle peut causer des désagréments digestifs (ballonnements, diarrhées) ou être contre-indiquée, notamment en cas de maladie rénale.
C’est pourquoi les médecins ajoutent parfois d’autres comprimés ou envisagent une autre stratégie dès le départ – en fonction du profil de chaque patient.
Pourquoi ajouter d’autres médicaments après la metformine ?
Chez de nombreuses personnes, la metformine fonctionne très bien pendant plusieurs années. Mais le diabète de type 2 est une maladie progressive : au fil du temps, le pancréas s’épuise et produit moins d’insuline, tandis que les tissus deviennent plus résistants à cette hormone. Lorsque le taux de sucre reste trop élevé malgré des doses optimales de metformine, il devient nécessaire d’élargir la stratégie thérapeutique.
Aujourd’hui, plusieurs familles de comprimés peuvent venir en renfort :
- Les inhibiteurs de la DPP-4 (sitagliptine, vildagliptine) aident l’organisme à prolonger l’action d’un peptide naturel qui stimule la sécrétion d’insuline au bon moment.
- Les inhibiteurs du SGLT2 (dapagliflozine, empagliflozine) obligent les reins à éliminer l’excès de glucose dans les urines ; ils font souvent perdre un peu de poids et abaissent la tension artérielle.
- Les analogues du GLP-1 existent surtout en injections, mais un comprimé de sémaglutide (Rybelsus) est désormais disponible ; il réduit l’appétit et favorise la perte pondérale.
- Enfin, les sulfonylurées (gliclazide, glimepiride) stimulent directement le pancréas ; elles sont efficaces mais exposent parfois à des hypoglycémies.
Les associations fixes (par exemple metformine + inhibiteur du SGLT2 dans le même cachet) simplifient la prise quotidienne : une seule pilule, un seul remboursement, moins d’oubli.
En résumé, lorsque la metformine ne suffit plus, ce n’est pas un échec, mais une étape prévisible. Les traitements modernes permettent de garder un bon équilibre glycémique sans multiplier les injections, en tenant compte des besoins, du mode de vie et des objectifs de chaque patient.
Des comprimés modernes : agir au-delà du sucre
Aujourd’hui, les traitements oraux du diabète ne se limitent plus à faire baisser la glycémie. Ils sont conçus pour répondre à des besoins plus larges : prévenir les complications cardiovasculaires, ralentir l’évolution des maladies rénales, favoriser la perte de poids et simplifier le quotidien des patients.
Parmi ces médicaments, les inhibiteurs du SGLT2 occupent une place importante. Leur action repose sur un principe simple : forcer les reins à éliminer une partie du sucre dans les urines. Résultat : une réduction du taux de glucose sanguin, accompagnée d’une légère perte de poids et d’une baisse modérée de la pression artérielle.
De nombreuses études ont confirmé leurs bénéfices supplémentaires :
- moins d’hospitalisations pour insuffisance cardiaque,
- ralentissement de la perte de fonction rénale,
- protection cardiovasculaire, même chez les non-diabétiques à risque.
Autre catégorie importante : les médicaments qui agissent sur les hormones de la satiété, comme les analogues du GLP-1. Leur objectif est double : réguler le taux de sucre en stimulant naturellement l’insuline, et aider à manger moins en réduisant l’appétit. Longtemps disponibles uniquement par injection, ils existent désormais aussi en comprimés, comme le sémaglutide oral (Rybelsus), facilitant ainsi l’adhésion au traitement.
Enfin, pour alléger la routine thérapeutique, il existe des comprimés combinés qui associent deux principes actifs dans une seule prise. Cela permet de réduire le nombre de pilules, d’éviter les oublis et d’améliorer la régularité du traitement – un vrai plus pour les patients qui prennent déjà plusieurs médicaments.
Ces nouveaux traitements ne sont pas réservés aux formes sévères du diabète. Ils sont souvent introduits dès les premières années, en particulier chez les personnes souffrant :
- d’hypertension ou de surcharge pondérale,
- de signes précoces d’atteinte rénale,
- ou tout simplement lorsque la metformine seule ne suffit plus.
En combinant efficacité métabolique, protection des organes et confort d’utilisation, les comprimés modernes représentent une avancée majeure dans le traitement du diabète de type 2.
Les analogues du GLP-1 : du stylo injectable à la simple tablette
Lorsqu’on mange, l’intestin libère une petite hormone appelée GLP-1. Son rôle : signaler au pancréas qu’il est temps de produire de l’insuline, ralentir la digestion et envoyer au cerveau un message de satiété. En reproduisant cet effet naturel, les analogues du GLP-1 se sont imposés comme l’une des avancées majeures contre le diabète de type 2.
Pendant longtemps, ces médicaments existaient uniquement sous forme de stylos injectables :
- liraglutide (Victoza®) : une injection quotidienne ;
- dulaglutide (Trulicity®) et sémaglutide en stylo (Ozempic®) : une seule injection par semaine.
Leur efficacité a été rapidement reconnue : baisse importante de l’HbA1c, perte de poids significative et, surtout, réduction du risque d’infarctus et d’accident vasculaire cérébral dans plusieurs études.
Le pas décisif : Rybelsus®, premier GLP-1 en comprimé
Pour les personnes réticentes aux aiguilles, le lancement du
Sémaglutide oral (Rybelsus®)
a changé la donne. Chaque matin, un comprimé à jeun avec un peu d’eau ; trente minutes plus tard, on peut prendre son petit-déjeuner. La technologie d’absorption (appelée SNAC) protège la molécule dans l’estomac et lui permet d’entrer dans la circulation sanguine presque aussi bien qu’une injection.
Ce que montrent les études PIONEER :
- réduction de la glycémie équivalente au sémaglutide injectable ;
- perte moyenne de 3 à 5 kg en quelques mois ;
- amélioration de certains marqueurs cardiovasculaires.
Dans quels cas l’envisager ?
Le sémaglutide oral est particulièrement intéressant pour les patients :
- qui souhaitent éviter les injections ;
- qui peinent à perdre du poids malgré les conseils diététiques ;
- ou dont le diabète reste mal équilibré malgré la metformine et/ou un autre comprimé.
Bien sûr, comme tout traitement, il nécessite un suivi médical : surveiller la fonction rénale, introduire la dose progressivement pour limiter les nausées, et respecter la prise à jeun pour garantir l’absorption.
En rendant l’action du GLP-1 aussi simple qu’une gélule, Rybelsus® ouvre la voie à une thérapie plus confortable, potentiellement plus motivante, et adaptée à la vie active de nombreux patients.
Ce que recommandent les experts aujourd’hui
Le traitement du diabète de type 2 n’est plus aussi standardisé qu’avant. Les recommandations actuelles des grandes sociétés scientifiques (comme l’ADA, l’EASD ou la SFD) insistent désormais sur une approche personnalisée, c’est-à-dire adaptée au profil de chaque patient.
Autrement dit, on ne propose pas le même traitement à tout le monde, même si la metformine reste souvent le point de départ. Le choix du ou des médicaments dépend aujourd’hui de plusieurs critères importants :
- Le poids corporel : en cas de surpoids ou d’obésité, les analogues du GLP-1 ou les inhibiteurs du SGLT2 sont souvent privilégiés, car ils favorisent la perte de poids.
- La santé cardiovasculaire : chez les patients ayant déjà eu un infarctus, une insuffisance cardiaque ou une artérite, on recommande des molécules qui protègent le cœur (GLP-1 ou SGLT2 selon le profil).
- La fonction rénale : certaines molécules aident à ralentir l’évolution des maladies rénales et sont recommandées dès les premiers signes d’atteinte.
- Les préférences personnelles : certains patients refusent les injections, d’autres oublient facilement plusieurs prises par jour. Cela influence le choix (comprimé simple, association fixe, prise hebdomadaire…).
Les experts insistent également sur un point essentiel : la précocité. Il est souvent plus bénéfique d’introduire ces nouveaux médicaments dès les premières années de la maladie, plutôt que d’attendre que la situation se complique. Une meilleure glycémie précoce = moins de complications à long terme.
Enfin, les médecins adaptent aussi la stratégie selon les antécédents médicaux (hypertension, cholestérol, antécédents familiaux, etc.) et les éventuelles interactions avec d’autres traitements.
Aujourd’hui, on parle donc moins de « ligne 1 » ou « ligne 2 », et davantage de « stratégie sur mesure », en tenant compte de ce que le patient vit, ressent, et peut suivre au quotidien.
Et demain ? Le futur du traitement du diabète de type 2
Les avancées récentes dans le domaine du diabète laissent entrevoir une nouvelle génération de traitements encore plus efficaces, plus pratiques, et mieux adaptés à chaque personne.
D’abord, la recherche se concentre sur les traitements dits “multi-cibles”, comme les agonistes doubles ou triples. L’exemple le plus marquant aujourd’hui est tirzépatide, une molécule qui agit à la fois sur les récepteurs GLP-1 et GIP, deux hormones naturelles jouant un rôle dans le contrôle de la glycémie et la satiété. Résultat : une baisse du sucre dans le sang encore plus marquée que les traitements actuels, et une perte de poids très significative dans les études cliniques.
Médicaments combinés intelligents sont aussi en cours de développement, comme des comprimés qui associent un inhibiteur du SGLT2 avec un analogue du GLP-1, ou des formulations à libération lente qui permettraient une prise hebdomadaire, voire mensuelle, par voie orale.
À côté de cela, la personnalisation du traitement va continuer à se renforcer : grâce aux données biologiques, génétiques, voire au mode de vie, les professionnels de santé pourront adapter de manière encore plus fine le traitement à chaque patient, en réduisant les risques d’effets secondaires et en augmentant l’efficacité globale.
Enfin, l’éducation thérapeutique, les outils de suivi numérique et la collaboration entre patient, médecin et pharmacien joueront un rôle toujours plus central.
Conclusion : nous sommes en train de passer d’une approche unique et rigide à une médecine plus humaine, plus souple et plus connectée. Le traitement du diabète de type 2 devient non seulement plus efficace, mais aussi plus proche de la vie réelle.
Glossaire des abréviations utilisées
- GLP-1 (Glucagon-Like Peptide-1) : Hormone intestinale libérée après un repas. Elle stimule la sécrétion d’insuline, ralentit la vidange de l’estomac et réduit l’appétit. Les analogues du GLP-1 sont utilisés pour améliorer la glycémie et favoriser la perte de poids.
- GIP (Gastric Inhibitory Polypeptide) : Autre hormone digestive qui renforce l’effet du GLP-1. Les médicaments « double agonistes » (ex. tirzépatide) agissent à la fois sur les récepteurs GLP-1 et GIP pour un effet renforcé sur la glycémie et le poids.
- SGLT2 (Sodium-Glucose Co-Transporter Type 2) : Protéine rénale responsable de la réabsorption du glucose dans les reins. Les inhibiteurs du SGLT2 forcent le corps à éliminer l’excès de sucre par l’urine.
- DPP-4 (Dipeptidyl Peptidase-4) : Enzyme qui détruit rapidement les hormones comme le GLP-1. Les inhibiteurs de la DPP-4 (ex. sitagliptine) prolongent l’action de ces hormones pour stimuler doucement la production d’insuline.
- HbA1c (hémoglobine glyquée) : Marqueur biologique qui reflète le taux moyen de sucre dans le sang sur les 2 à 3 derniers mois. Utilisé pour évaluer l’équilibre du diabète.
- ADA (American Diabetes Association) : Organisation scientifique de référence aux États-Unis pour les recommandations en matière de diabète.
- EASD (European Association for the Study of Diabetes) : Association européenne d’experts en diabète. Elle publie régulièrement des recommandations conjointes avec l’ADA.
Références scientifiques
- Effets cardiovasculaires de l’empagliflozine (EMPA REG OUTCOME, NEJM 2015)
- Effets rénaux et cardiovasculaires de la dapagliflozine (DECLARE TIMI 58, NEJM 2019)
- Effets prolongés de l’empagliflozine sur l’insuffisance rénale chronique (EMPA KIDNEY, NEJM 2024)
- Sémaglutide oral vs sitagliptine (PIONEER 3, Lancet 2019)
- Tirzépatide vs sémaglutide hebdomadaire (SURPASS 2, NEJM 2021)